Né à Paris le 3 décembre 1930, Jean-Luc
Godard fera ses études en Suisse, puis à Paris et à Grenoble
avant de préparer un certificat dethnologie à la Sorbonne
au début des années cinquante. Se passionnant pour le cinéma,
il fait partie du groupe de jeunes critiques des Cahiers du cinéma, où
il publie des articles à partir de 1952. Il passe bientôt à
la réalisation avec cinq court métrages : Opération
béton (1954), un documentaire assez classique sur la construction
dun barrage hydroélectrique en Suisse; Une femme coquette (1955, 16 mm), son premier film de fiction, basé sur un conte de Maupassant
(Le Signe) mais jamais distribué ; Charlotte et Véronique
ou Tous les garçons sappellent Patrick (1957), son premier
succès public ; Une histoire deau (1958), et, le plus
intéressant de tous, Charlotte et son Jules (1959), où
Jean- Paul Belmondo tient le rôle principal et qui ressemble de certains
côtés à une esquisse de la longue séquence dans la
chambre de Patricia dans A bout de souffle. En plus des courts métrages,
Godard travaille comme monteur et comme dialoguiste pour des films dautres
metteurs en scène, ce qui lui donne une formation dont on verra les fruits
dans A bout de souffle. Godard est tout de même le seul membre du
groupe des critiques des Cahiers qui na toujours pas, en 1959, réalisé
son premier long métrage. Il se rattrapera vite.
Son premier long métrage A bout de souffle (1960) est un
véritable triomphe auprès du public et devient vite le film-manifeste
de la Nouvelle Vague. Godard est le cinéaste français le plus résolument
indépendant et iconoclaste, celui qui, plus que quiconque, refusera de
céder aux tentations du cinéma grand public. Son cinéma est
une expérience permanente, une recherche incessant doriginalité
qui va inexorablement vers labstraction et lhermétisme. Il
nous propose une réflexion ironique sur la société mais,
en même temps, une réflexion sur la représentation du réel
par le cinéma qui exige du spectateur une certaine culture et un effort
de compréhension très soutenuce qui nempêche pas
certains films de paraître inaccessibles. Il nen reste pas moins que
Godard a exercé, et continue sans doute dexercer, une influence énorme
sur lévolution du cinéma contemporain.
Sa carrière comprend environ soixante-dix films, dont plusieurs ont connu
un succès certain, tant auprès du public que chez les critiques
de cinéma, et dautres méritent dêtre vus (et revus ).
On compte parmi ceux-ci, avec A bout de souffle, Vivre sa vie (1962), film sur la condition de la femme (et un des rares succès commerciaux
de Godard), Le Mépris (1963), où il sagit dune
réflexion mordante sur la décadence de lindustrie du cinéma,
ainsi que sur la dégénérescence des rapports dun couple
marié, et deux films de 1965, Alphaville, une pastiche du
film policier qui se transforme en science-fiction, et Pierrot le fou,
une sorte de réinvention du film noir qui est considérée
par certains comme un des meilleurs films de Godard.
A partir de Masculin-Féminin (1966), Godard fait un virage
vers le cinéma révolutionnaire, sattaquant à
la société de consommation, comme à la politique américaine
au Vietnam. Avec Deux ou trois choses que je sais delle (1966),
il revient à la question de la condition féminine, ainsi quau
thème de la prostitution, avant de revenir à la politique, en 1967,
avec La Chinoise, où un groupe détudiants bourgeois
fantasment naïvement une révolution maoïste, et Weekend , une tirade anti-bourgeoise et révolutionnaire où il met en scène
un embouteillage monstre qui provoque une série de carambolages meurtriers.
Le courant politique se poursuit avec Tout va bien (1972), une histoire
de grève et de séquestration reliée à léchec
dun couple, qui frappe par son nihilisme. A la fin de la décennie,
Godard reprend de nouveau le motif de la prostitution, en y mêlant une analyse
de la sexualité, avec Sauve qui peut (la vie) (1979), qui
plaît à un plus large public que dhabitude.
A partir des années quatre-vingts, les films de Godard séloignent
de plus de plus des schémas narratifs conventionnels, versant dans un formalisme
abstrait qui rebute bien des spectateurs. Prénom Carmen (1982),
pourtant, une adaptation de la nouvelle de Mérimée (ou de lopéra
de Bizet, si lon veut), va à lencontre de cette tendance et
connaît un certain succès auprès du public. Séduisant
également les critiques, le film se voit décerner le Lion dor
au Festival de Venise. Lannée suivante Godard provoquera un scandale,
avec le succès que cela implique, avec Je vous salue, Marie (1983), une version modernisée de lhistoire de la conception immaculée
de la vierge Marie. En 1984, et nous nous arrêterons là, Godard réalise Détective, un thriller très alambiqué quil
réussit à rendre pratiquement incompréhensible par un montage
qui frise lincohérence, mais qui ne manque pas dintérêt
pour les spectateurs qui persévèrent
Filmographie choisie de Jean-Luc Godard (longs métrages)
:
1959 A bout de souffle 1960 Le Petit Soldat 1961 Une femme est une femme 1962 Vivre sa vie 1963 Les Carabiniers
Le Mépris 1964 Bande à part
Une femme mariée 1965 Alphaville
Pierrot le fou 1966 Masculin-féminin
Made in U.S.A.
Deux ou trois choses que
je sais delle 1967 La Chinoise
Weekend 1968 Le Gai savoir One plus One
1972 Tout va bien 1979 Sauve qui peut (la vie) 1981 Passion 1982 Prénom Carmen (Lion dOr du Festival de Venise 1983) 1983 Je vous salue Marie 1984 Détective 1986 Grandeur et décadence dun petit commerce de cinéma 1987 Soigne ta droite (Prix Louis Delluc 1987)
King Lear 1990 Nouvelle Vague 1993 Hélas pour moi 1996 For Ever Mozart 2001 Eloge de lamour