Ma nuit chez Maud d’Eric Rohmer (1969)

Le narrateur du film, qui est aussi le protagoniste, est ingénieur aux usines Michelin à Clermont-Ferrand. (Comme son nom n’est jamais prononcé dans le film, il est généralement convenu de lui donner le prénom de l’acteur, “Jean-Louis”.) Ayant travaillé pendant plusieurs années au Canada et en Amérique du Sud, Jean-Louis n’est revenu que depuis deux mois dans la région où il a grandi. Aux alentours de Noël, on le voit un dimanche à la messe, où il aperçoit une jeune femme blonde qu’il ne connaît pas mais dont il décide soudainement de faire son épouse. Il a du mal, pourtant, à la rencontrer pour se faire connaître d’elle.

Jean-Louis est amateur de mathématiques et s’intéresse en particulier au calcul des probabilités. En traînant dans une librairie de Clermont après la messe, il tombe sur un exemplaire des Pensées de Pascal, qu’il achète. Plus tard, en entrant dans une brasserie, il rencontre un ancien ami de lycée, Vidal, devenu marxiste et professeur de philosophie à l’Université de Clermont. En dînant ensemble, ils discutent de probabilités (la probabilité statistique de leur rencontre, par exemple) et, dans ce contexte, du fameux “pari” de Pascal, où il s’agit de parier pour ou contre l’existence de Dieu. Le lendemain soir, Vidal emmène Jean-Louis dîner chez une amie, Maud, dont il est visiblement épris mais avec qui il ne s’entend pas assez bien, explique-t-il, pour songer à l’épouser. Celle-ci, pédiatre, divorcée depuis peu et mère d’une petite fille, appartient à une vieille famille de libres-penseurs. Athée, Maud prend visiblement plaisir à engager la conversation avec un catholique pratiquant comme Jean-Louis. Au dîner, on parle de religion et surtout de Pascal, dont Jean-Louis n’apprécie pas la morale janséniste tellement rigoriste qu’elle rejette la bonne chère.

Après dîner, Maud et Vidal s’amusent à interroger Jean-Louis sur sa vie amoureuse, persuadés qu’il y a une femme dans sa vie. Celui-ci nie vigoureusement. Vidal trouve un prétexte pour rentrer chez lui, laissant Jean-Louis seul avec Maud, qui le retient comme malgré lui. Dans la conversation qui suit, Maud révèle que son mari et elle avait eu tous deux des liaisons amoureuses, son mari avec une jeune femme catholique que Maud l’a obligé à laisser tomber. L’amant de Maud, lui, est mort dans un accident de voiture. Lorsque Maud se couche, Jean-Louis, ayant compris qu’il n’y avait qu’un seul lit dans l’appartement, se roule dans une couverture et s’installe dans un fauteuil, résistant à la tentative évidente de séduction de la part de son hôte. Au petit matin, il s’allonge pourtant à côté d’elle sur le lit et, enlacé par la jeune femme, commence à l’embrasser avant de se maîtriser et de se dégager de ses bras. Maud s’échappe du lit, offusquée, ce qui précipite le départ de Jean-Louis.

Dehors, Jean-Louis voit passer la jeune femme blonde à vélo-solex, court après elle et se présente. La jeune femme, qui s’appelle Françoise, accepte un rendez-vous pour le lendemain. Pendant la journée, Jean-Louis fait une randonnée dans la neige, avec Maud et Vidal, puis, le soir, rencontre par hasard Françoise en ville. Comme il neige et que les routes sont dangereuses, Jean-Louis persuade Françoise de monter dans sa voiture et de se laisser raccompagner chez elle, en banlieue, où elle vit dans un foyer d’étudiants. Quand la voiture de Jean-Louis est immobilisée par le verglas, Françoise l’invite à passer la nuit dans une chambre libre dans son foyer. Le lendemain matin, Jean-Louis lui fait la cour, mais elle se montre réticente ; elle finira par lui avouer, quelque temps après, qu’elle venait de rompre avec un homme marié dont elle avait été très amoureuse. Elle ne se sent pas digne de l’amour de Jean-Louis. Celui-ci, pour calmer les scrupules de la jeune femme, lui dit qu’il venait de passer la nuit avec une femme le matin même où ils ont fait connaissance. Ayant essayé de reprendre contact avec Maud, avec qui il avait noué des rapports de sympathie, Jean-Louis apprend qu’elle a quitté Clermont pour ouvrir un nouveau cabinet de pédiatre à Toulouse.

Cinq ans plus tard, Jean-Louis et Françoise, en vacances au bord de la mer avec leur petit garçon, rencontrent Maud, qui est remariée. Jean-Louis est surpris de constater que les deux femmes se connaissent déjà — et que Françoise paraît très gênée par la rencontre. Ayant avoué à sa femme que c’était avec Maud qu’il avait passée la nuit avant de la rencontrer, et sur le point de révéler qu’il ne s’est rien passé entre eux, il comprend subitement que la jeune femme catholique avec laquelle l’ex-mari de Maud avait eu une liaison, c’était Françoise elle-même. Il ne lui révèle donc pas que Maud n’avait pas été sa maîtresse.